Dans la nef dépouillée de la Cathédrale Saint-Pierre, Romeo Castellucci a transformé le Stabat Mater de Pergolèse en rituel visuel et sonore. Encadrée par deux pièces de Scelsi, la musique s’est élargie en une expérience presque cosmique, portée par Barbara Hannigan (direction et soprano) et le contre-ténor Jakub Józef Orliński, accompagnés d’Il Pomo d’Oro, de l’Ensemble Contrechamps et de la Maîtrise du Conservatoire populaire de Genève.
Plutôt qu’une simple exécution musicale, Castellucci propose une liturgie des images : procession d’enfants, gestes symboliques, visages blanchis, costumes qui se dépouillent. Dans ce lieu chargé de mémoire protestante, l’effet est saisissant : le deuil devient universel, partagé, et la douleur se fait compassion.
Hannigan et Orliński tissent une interprétation d’une grande intensité mais sans pathos, où chaque silence et chaque souffle comptent. L’ensemble aboutit à une expérience rare : un Stabat Mater qui ne console pas mais qui ouvre, dans l’espace sacré, une méditation commune sur la perte et la présence.
Une merveille.
© Monika Rittershaus